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Interview de Jean-François Bombenger (CMC) - Avril 2013


Bonjour Jeff. Educateur physique et vainqueur du Trophée des Vosges trail 2012, tu n'as pas toujours couru. Peux-tu revenir sur ton parcours sportif ?

J'ai effectivement commencé par le Judo. Comme tout sport de combat j'ai rapidement intégré la course à pied dans la préparation aux compétitions. Le cross était ce que je préférai. Cela se "goupillait" également bien puisque placé avant les échéances nationales en Judo. Lorsque je suis allé à Strasbourg pour mes études de STAPS j'ai du mettre de coté la pratique des cross puisque j'arrivai à 20 heures d'entraînements avec le judo et la musculation ! A l'âge de 25ans je commencai à saturer des week ends enfermé dans des dojos. Avec la ligue d'alsace de Judo , on partait sur des tournois sur toute la France mais au final on ne voyait que le dojo ... J'ai repris donc tout naturellement la course à pied avec d'entrée de jeu une attirance pour le trail. En effet mon futur beau père était le premier vainqueur de l'ultra des templiers! Je me disai qu'il fallait être fou mais en même temps cela m'intriguait. Cela faisait l'alliage de deux passions : la montagne ( transmis par mes parents) et la course à pied. C'est ainsi qu'en 2005, mon père et moi avons décidés de s'inscrire au Trail de faverges (42km et 2500m de D+). J'ai payé pour apprendre ... Je venais de faire un chrono de 33 minutes sur 10km et pensait que cela suffirait à être tranquille au moins 30km ... Ca c'était la théorie. Cela a été une galère sans nom car il faut bien le dire j'avais complétement sous estimé l'importance de la préparation... Je suis arrivé complétement "explosé" dans les 50 derniers .. Nous nous sommes dits : plus jamais un truc de fou comme ça , il faut être dérangé... Bon faut croire que nous le sommes un peu puisque j'ai continué depuis et que mon père est même inscrit à l'UTMB cette année !
Trail du Petit-ballon 2012
(Photo : V. Chapin)

Avec 2 autres membres du Colmar Marathon Club (CMC), Lionel Poirier et Dany Miclo, vous lancez il y a maintenant 5 ans, le Trail des Marcaires. Cette année il sera organisé le 26 mai, quel seront les autres nouveautés ?

Cela paraît loin maintenant ! C'était assez folklorique au début. Tellement de boulot , de couacs et de stress ! Courir un trail c'est finalement beaucoup plus facile qu'organiser. Mais nous avons la chance d'avoir une ambiance exceptionnelle au Colmar Marathon Club. Cela aide à faire des réunions bien sympathiques où la gastronomie peut des fois avoir une importance fondamentale ! L'esprit trail certainement.

L'évenement a grandi et nous sommes maintenant une quinzaine à travailler en amont de la course. Le jour même c'est 80 bénévoles qui se retrouvent dans la belle vallée de munster.

Cette année sur le 52km le parcours sera identique qu'en 2012 sauf un petit détour au Steinberg (km 43). Le panormama y sera superbe.

Nous avons abandonnés le 18km pour un 29km par des soucis de calendrier régional mais également pour mieux coller à l'esprit trail.Le 29km sera magnifique puisqu'il parcourera le début du parcours du 52km jusqu'au lac d'altenweier. Ensuite direction Sondernach par une alternance de chemins et sentiers jusqu'à l'arrivée. Cela ne sera pas une épreuve au rabais. Les coureurs vont en prendre plein les yeux.

Enfin le Relais de marcaires( 11km, 24km, 17km) représente un beau défi à faire entre potes et collègues et reprend le même parcours que le 52km. A noter qu'il y aura un classement spécfique aux entreprises.

Avec Salomon, dont tu es l'ambassadeur chez Jog'R, tu animes le City Trail Salomon 2013 de Strasbourg. Comment se passe ces séances ? Qu'en apprends-tu ?

Un vrai moment de partage. Le but de ces séances est de montrer qu'en 50 minutes on peut travailler de manière très efficace et très ludique même en ville. Les obligations familliales et professionnelles font que l'on a pas toujours l'opportunité de se rendre en montagne. C'est très instructif dans les deux sens puique les questions fusent et cela me permet à moi aussi de prendre du recul sur la discipline. Je me rends compte également que peu de clubs FFA s'y intéressent et ne permettent pas l'acceuil de toutes ces personnes pourtant avides de questions. A quand une formation pour les entraîneurs de trail ? Car il faut bien le dire la course à pied et le trail ont un socle commun mais il y a des différences assez importantes quant aux contenus d'entraînement.

(Photo : V. Chapin)

Tu as su adapter l'entrainement au Trail pour des coureurs habitants en plaine et en ville. Dans le dernier Esprit Trail, l'entraineur Jean-Louis Bal, insiste sur le fait que pour développer l'endurance de force, essentiel pour le trailer, le vélo reste l'idéal, mieux que l'exercice des escaliers par exemple.
Quel sont selon toi les base de l'entrainement du traileur ?
La notion la plus importante est le denivelé. Sur une épreuve à faible denivellé, l'entraînement type route peut largement suffire. Par contre lorsque les denivelés dépassent les 1500M de D+ cela n'est plus du tout le même sport. Et effectivement je rejoins Jean-Louis Bal sur l'importance capitale de l'endurance de force.

L'endurance de force permet de mieux grimper mais surtout de mieux encaisser les descentes. Il faut savoir que c'est ce dernier élément qui est primordial en trail. Grimper 1500m de D+ ca tout le monde peut y arriver par contre decsendre 1500m de D- c'est une autre histoire.

Crêtes Vosgiennes (Photo : N. Fried)

Les escaliers ont comme intéret de muscler surtout les quadriceps mais on oublie un peu les ischios et les fessiers si importants dans les descentes. c'est pourquoi j'insiste sur des exos de pré fatigue avant de monter les escaliers. Ces exercices comme la chaise ou la marche du pénitent sont très complets et permettent de travailler l'endurance de force sur tous les muscles des jambes. A cela s'ajoute le travail essentiel du gainage afin de mieux restituer l'energie et de s'éviter tout problème de dos.

Porter un sac à dos de 2kg pendant 8 heures n'est pas anodin. Il faut un corps fort musculairement.

Pour ta question sur le vélo, cela reste un bon moyen de faire également du travail de qualité et surtout de récupération. Le fait de changer de discipline est également appréciable pour la motivation mais cela demande un peu plus de temps et ca peut être un gros inconvénient.

Pour finir les bases sont l'endurance de force , l'endurance active et l'endurance fondamentale ( sans rentrer dans la démesure, 2h pour un trail de 42km à 4h grand maximum pour des ultras ). Et puis on en oubierait presque l'essentiel c'est prendre du plaisir à l'entraînement et écouter ses propres sensations.
Peux-tu nous définir les différences entre ces 3 types d'endurances ?

L'endurance de force c’est produire un niveau de tension élevée au sein des fibres musculaires. C’est ce qui vous permettra d’élever votre quotient de vitesse ascensionnelle. Plus votre endurance de force est développée plus vous aurez la possibilité d’économiser votre PMA. Concrétement cela se fait à travers des exos de pliométrie, musculation, PPG, etc.

L'endurance active est une intensité de travail qui correspond à 82% de la FCM. C'est souvent l'allure trail en montée. Lorsque l'on va au delà lors d'une course, on le paye plus tard... Cela se fait sous forme continue (40min à 1h15) ou par intervalles (2x30min, 2x45min, 3x25min)

L'endurance fondamentale se travaille lors de sorties longues avec tempo régulier avec ratio distance/dénivelé proche de votre objectif. C'est souvent lors de ces séances là que les erreurs se font. On cherche à se jauger dans les montées, à voir comment on envoit dans les descentes. Cela se traduit souvent par de grandes fatigues par la suite. Le tempo lent est de rigueur.



Trail du Petit-Ballon
(Photo : N. Fried)
Professeur d'EPS et entraineur au sein de ton club le CMC, n'as-tu jamais voulu te lancer dans le coaching professionnel, comme beaucoup d'autres ?

Si j'y ai pensé l'année dernière car j'ai eu quelques demandes. J'ai préféré dynamiser la section trail du Colmar MC. Nous sommes maintenant 75 traileurs venant de toute l'alsace ! Je propose des plans d'entraînement communs selon les différents objectifs ( trail court, trail long, ultra) tous les 15 jours. A cela s'ajoute 2 à 4 RDV hebdomadaires où nous sommes des fois une trentaine de joyeux lurons ! En plus de tout cela je leur fournis un cahier d'entraînement qui leur permet à un moment donné dans la saison d'avoir une certaine autonomie par rapport à leur programme spécifique.

Au final je dois dire que je ne crois pas à la personnalisation de plans d'entraînements par mail ou par téléphone. Entraîner c'est connaître l'humain , le voir évoluer. Je le fais pour mon collègue et ami Mathieu Motsch mais je le vois tous les jours et je partage ces séances. C'est de l'ajustement continu. Personnaliser pour 4/5 personnes oui , plus me parait pas très cohérent.

Par contre j'aimerai bien à l'image des city trails organiser un jour des stages d'entraînement où l'idée serait de partager mon expérience de l'entraînement et des milles et une astuces du traileur.

Après la saison de cross, comment c'est passé ton Trail du Petit-Ballon où tu termines à une belle 5ème place ?

Très bien, cela a été un vrai bonheur de courir dans toute cette neige ! C'est fort d'avoir en Alsace un trail qui regroupe des tenors tel que Mallardé, Mantel et surtout Csaba ! C'est vraiment l'évenement de début de saison dans tout l'est de la France. Eric Millet et toute son équipe organisatrice font un sacré boulot ...
Quels seront tes objectifs 2013 ?

J'ai beaucoup de denivellé et de beaux parcours au programme cette année ! Le trail des allobroges (57km et 4000m D+) mi mai , le 80km du mont blanc (6000m D+) et les france de trail à Gap (52km et 3000m D+ ) où l'on espère avoir une carte à jouer avec le club par équipes. Entre temps je ferai un peu de court en Alsace mais les jambes risquent d'être plombés ...

Trail du Petit-ballon 2013 (Photo : N. Fried)

Quel est ta vision du Trail et de son développement dans le Monde, en France et en Alsace ?

Le trail est un retour au source vers la nature. Dans nos vies bien réglés cela offre souvent un zeste d'aventure.

Ma vision du trail ? paysages sublimes, sentiers, partage, recherche de ses limites physiques et grignotage de saucisson bien sûr !

Le développement du trail en Alsace est encore un peu timide mais cela ne saurait tarder ! C'est vrai qu'à part le petit ballon aucune épreuve de trail ne dépasse les 250 concurrents. La distance fait encore un peu peur.

Le seul hic au développement est le coté semi auto suffisance qui disparait au profit de nombreux ravitaillements.

Trail du Petit-Ballon
(Photo : N. Fried)
Je sais que (comme moi) tu es à cheval sur la dénomination et définition du Trail. Comment réagis-tu à toutes ces nouvelles courses nature ou de montagne de 15 à 20 ou 30km, qui utilise le terme "vendeur' trail ?

J'avoue que cela me fait grincer des dents... En dessous de 40km cela n'a rien d'un trail aussi bien au niveau des allures qu'en terme d'auto suffisance et de gestion de course.

On trouve des "trails" où le kilométrage est apparant, les ravitaillements trop nombreux et un balisage exagéré. Là aussi on s'éloigne de l'esprit trail. C'est un peu le virage que je déplore. La fédération a encore un gros travail à faire là dessus. Mais en même temps elle a instauré la notion de trail court par un simple effet de marketing. Business is business...

Après on a mis de l'eau dans notre vin puisque pour faire comme tout le monde nous avons appellé notre nouvelle course : le 29km du trail des marcaires. Il y aura cependant que 2 ravitaillements et beaucoup de technicité et de denivelé au programme.
Peux-tu définir le Trail en 5 mots ?

Montagne, plaisir, partage, dépassement de soi et tartiflette.

Merci Jeff ! et rendez-vous au Trail des Marcaires.

Interview réalisée par Nicolas Fried.

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